Cie Corps Conducteurs

L’Histoire

Le sujet de cette dispute, on le connaît : lequel des deux sexes a-t-il le premier commis une infidélité ?

HERMIANE soutient que "la première inconstance ou la première infidélité n’a pu être commencée que par quelqu’un d’assez hardi pour ne rougir de rien", autrement dit un homme. LE PRINCE, qui aime HERMIANE, semble en convenir. Mais n’est-ce pas "par pure galanterie", pour plaire à HERMIANE ?

Comment trancher ? En interrogeant « la nature ». Il se trouve que le père du PRINCE connut la même dispute dix-huit ans auparavant. Visionnaire, il fit élever séparément dans une propriété isolée en forêt quatre enfants, deux de sexe masculin et deux de sexe féminin. C’est là que cette nuit le PRINCE vient conduire HERMIANE. "On va donc pour la première fois leur laisser la liberté de sortir de leur enceinte, et de se connaître [...] ; on peut regarder le commerce qu’ils vont avoir ensemble comme le premier âge du monde ; les premières amours vont recommencer, nous verrons ce qui en arriver".

UNE EXPÉRIENCE DE LABORATOIRE

Tel est "le spectacle très curieux" auquel HERMIANE et les spectateurs sont conviés : sous l’œil de nos deux nobles réfugiés dans une galerie, nos quatre enfants – ÉGLÉ, AZOR, MESRIN, ADINE – vont se rencontrer selon un schéma implacable dont la logique fait penser à un protocole d’expérience : garçon 1 – fille 1 ; fille 1 – fille 2 ; garçon 1 – garçon 2 ; garçon 1 – garçon 2 – fille 1 ; etc.

Au cours de ces rencontres planifiées à l’avance par CARISE et MESROU, leurs tuteurs, ces jeunes gens vont vivre innocemment les tiraillements du désir, de l’amour et de l’amour-propre, ces rouages obligés qui structurent toute l’œuvre de MARIVAUX. En une journée, ils feront l’épreuve de toute une vie. C’est dire s’ils vont vieillir vite. Trop jeunes, ils ne pourront penser le libertinage dont ils font pourtant la douloureuse expérience dans cette combinatoire des désirs à laquelle leurs maîtres – MARIVAUX ? LE PRINCE et HERMIANE ? –, ou tout simplement la vie – la nature et la société –, les a contraints. Le désarroi d’ÉGLÉ, qui avait "dessein d’aimer toujours Azor et [qui a] peur d’y manquer" est celui des trois autres adolescents et, au delà, le nôtre.

lundi 9 février 2009, par Webmaster

 

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